Enfant de FOUGÈRES SUR BIÈVRE- Jean-Claude MORINA et sa famille- Une belle aventure controise
-Article rédigé à partir des propos de Jean Claude MORINA et de ses enfants, propos recueillis en 2022 par François Coulon. Article publié dans la revue : Patrimoine dans votre commune, n°55, Contres : CDPA 41, 2022, p. 212-218. (Comité départemental pour le patrimoine et l' archéologie en Loir et Cher).
AUTRES SOURCES :
-Article Le Petit Solognot n°59 Novembre 1988
-Article La NR du 26/12/1986 par Gérard Deletang.
-Article La NR du 15/11/2012 par Laura Goyer, correspondante NR
-Iconographie : Famille Morina
Le logo de Morina (photographie d’un sac tissu) sur lequel Jean-Claude Morina a voulu que soit représenté le château de Fougères sur Bièvre. Plus tard après la vente de l’entreprise, le château sera remplacé par une toque de pâtissier…
Enfance à Fougères sur Bièvre, et adolescence à Blois :
Jean-Claude est né le 3 janvier 1930, dans la boulangerie de ses
parents, à Fougères sur Bièvre (route d’Ouchamps, actuelle rue Amable
Quenioux). Son père Roger (1893-1967) et sa mère Régine née Daridan
(1897-1973), couturière remarquable,
tiennent la boulangerie de 1921 à 1945. De son enfance, Jean-Claude
reste marqué par le seul maître d’école qu’il a eu, Monsieur Varagnat. Il garde
à ce jour une admiration et un respect total pour cet instituteur qui le
conduit en 1943 au Certificat d’Etude à Contres (déjà) avec mention. C’est de cette période également que date sa
passion totale pour l’accordéon. À ce moment sa mère Régine Daridan comme il
dit, le présente à Monsieur et Madame Serrault, pâtissier à Blois. La
« Pâtisserie du Château » située rue Porte Coté est une pâtisserie
importante qui emploie 6 ou 7 apprentis
où émerge Jean-Claude. Il est logé dans les étages. C’est le début d’une grande passion. Il voue une immense admiration à Mr Serrault.
Anecdote nostalgique que n’oublie pas Jean-Claude : Il rend visite à Mme
Serrault en fin de vie à l’hôpital. Elle lui dit « Jean Claude, joue moi un petit air d’accordéon ». Il
s’exécute…
Jean-Claude aura durant toute sa scolarité Mr Varagnat comme maître.
1er rang assis: 1- Pinon Bernard 2- Coty Martial 3- ? Jarry 4- Oury Guy 5- Jouanneau Jean 6- Martineau André 7- Guérin Gilbert 8- Raynaud Roger
2ème rang debout : 9- Isler Jean 10- Feuillet Jacques 11- Oury Gilbert 12- Plat Michel 13- Leroy Gilbert 14- Boiron Lucien 15- Bucquet André 16- Geschwind Roger 17- Firmin Georges
3ème rang perchés : 18- Quenioux Roger 19- Quenioux Maurice 20- Lespagne Michel 21- Morina Jean-Claude (13 ans) 22- Pinot Modesto 23- Goyer Claude 24- Jouanneau René 25- Guérin Jean Instituteur : Varagnat Georges William
Jean-Claude, apprenti chez Mr Serrault, pâtisserie du
château, rue Porte Coté à Blois
Ambassade américaine
à PARIS : À 18 ans, il rejoint Paris, avec
sa fiancée Thérèse Michau née en 1932, originaire de Contres qui deviendra son
épouse en 1952. Celle-ci tient une loge dans un très chic immeuble de Paris où
elle côtoie du « beau monde ». Elle
est très appréciée pour sa gentillesse, sa propreté, les services
qu’elle rend. Tandis que Jean-Claude travaille dans une petite pâtisserie, où
il ne s’épanouit pas, il rencontre un
ouvrier, Gaston qui travaille à l’ambassade des Etats Unis et qui lui propose
de le présenter. À l’entretien d’embauche, on le trouve trop jeune. Rassuré par
Gaston, il se jette malgré tout à l’eau et propose d’être pris à l’essai pour
10-15 jours, sans salaire… C’est alors le début d’une belle aventure. Les
débuts sont difficiles, le travail est compliqué, il apprend beaucoup. « Tout cela grâce à ma femme »
dit-il. Il y restera 5 ans. Il fut comme un roi à l’ambassade et il lui est
proposé d’aller travailler aux Etats Unis. Sa femme travaille, leur fille
Mary-Claude vient de voir le jour. On est en 1953. Il ne part pas et décide de rester en France.
Un incident de santé l’éloignant de l’ambassade américaine, Jean-Claude Morina,
décide avec son épouse Thérèse, de revenir dans la région dont ils sont
originaires et de s’y installer
Retour en Loir et
Cher : Durant environ deux années, ils vont tenir en gérance une pâtisserie à
Romorantin. Mais Jean-Claude ne trouvera pas dans cette gérance artisanale les
conditions de fabrications, les méthodes de travail conformes à ses exigences
en matière de qualité et d’efficacité. Ils décident de quitter les lieux et de
venir s’installer à Contres. Naissance de leur deuxième fille Maryline.
1957 : Contres,
lancement et création de l’entreprise de Pâtisserie Biscuiterie
industrielle : C’est là que sa passion, son savoir-faire, sa force, sa volonté, sa
détermination, son sens du commerce, et bien plus encore, feront que
Jean-Claude Morina décide de s’installer dans 30m², à Contres, passage de
l’Isle. Il est aidé d’un apprenti et se met à fabriquer des cakes, des génoises
qu’il commercialise lui-même, parcourant le canton en 4CV pour livrer
boulangers et épiciers. Le premier pas était franchi, bien qu’on fût encore au
stade artisanal. Un second défi allait imposer de passer à la dimension
industrielle. Jean-Claude Morina décidait en effet de tenter sa chance sur le
marché de la « grande distribution » de l’époque. Il est soutenu par
son épouse Thérèse qui l’encourage à se lancer et présenter ses gâteaux aux
Familistères. La qualité de ses produits séduit alors un premier acheteur qui
passa commande … de plusieurs milliers d’unités. Il fallait se retrousser les
manches, toute la famille s’y met, faire tourner à plein le pauvre four qu’on
possédait alors. Mais ce pari un peu fou fut gagné, et bientôt la jeune
entreprise controise eut ainsi pour clients, les Familistères, les Comptoirs
Modernes, DOC de France … Cette fois sonnait l’heure du passage à la dimension
industrielle, d’une petite affaire il en fait une moyenne affaire puis une très
grande entreprise d’échelle industrielle à la fin des années 70. « Morina
Pâtissier prend son envol ». C’est l’heure des investissements,
l’heure de constituer puis étoffer une équipe. Nouvelles étapes. Nouveaux
challenges.
Les locaux, rue Jules Antoinet. Ils appartiennent toujours à St Michel et servent d’entrepôt. Photo 2022 FC
1961 : Le premier bâtiment industriel voit le jour rue Jules Antoinet (photo). La fabrication de cakes, de génoises se développe. Apparait celle de la madeleine puis de la génoise fourrée, un des produits phares de Morina Pâtissier. Un premier four ayant dû être agrandi, il fallut ensuite en installer un second, qui fut à son tour allongé. L’entreprise connait un essor régulier, constant.
Le 1er four GOUET
1972 : Création
de la Société agro-alimentaire, MORINA SA. : L’activité s’est considérablement développée. Première commande de 5000
bûches de Noël, toutes fabriquées à la main et décorées une par une (voir
photo). Passage à l’échelle industrielle en 1979. 73 salariés controis en 1986. Le nombre de
clients s’accroit, Intermarché, Casino, Monoprix, Carrefour entre autres, en
font partie. La dimension industrielle est atteinte, mais l’équipe toute
entière, reste fidèle à ce que l’on pourrait appeler « l’esprit
Morina » qui consiste avant tout à maintenir cette qualité artisanale,
cette qualité « pâtissière » qui est et qui restera le vrai secret du
succès de cette marque qui est aussi pour les consommateurs un véritable
label.
Jean Claude Morina et sa mère Régine. Fabrication des buches de Noël.
Chaîne de fabrication des buches.
1976 : 1er bâtiment de stockage en ZI (photo) :
Nouvelle ZI, 1er bâtiment de stockage (la production se faisant toujours rue Jules Antoinet)
Sur la nouvelle ZI, Jean-Claude Morina teste la mise au point du pétrin en goûtant la pâte.
1983-1985 : Extension et mise en place des lignes de fabrications en ZI (photo) : L’expansion reste à l’ordre du jour de la
société controise. Extensions et mise en place de lignes de fabrication,
embauches de nouveaux collaborateurs, implantation d’une unité
hypermoderne en zone industrielle. Tels
sont les temps forts de cette expansion.
La ligne de production des buches de Noël, mécanisée, stade industriel
Fabrication des buches de Noël. Le décor à la main n’est pas automatisé. Andros cessera cette fabrication de buches
« Foisonneur », appareil permettant la fabrication de la génoise. (Augmentation de volume par inclusion d’air).
« Etuyeuse » permettant la mise en forme du carton à partir de l’étui.
1987 : Vente au groupe
ANDROS : Une page se tourne, le challenge est réussi. Jean-Claude Morina se retire. Il sait qu’il a pu
compter durant toutes ces années sur sa famille, ses collaborateurs, ses
employés, qui l’ont soutenu en travaillant à ses côtés et aidé dans son
engagement. Ils ont ainsi pu contribuer à la réussite du challenge que
Jean-Claude Morina s’était fixé, à savoir amener à un niveau respectable la
Société « Morina Pâtissier » Andros, un choix stratégique : ce n’est pas un hasard si
Jean-Claude Morina a choisi ce groupe, car comme lui, Andros cultive des
valeurs de terroir, de tradition, de qualité et de savoir-faire sans oublier
l’esprit d’équipe. Morina
Pâtissier s'est développé sur un produit universel : la madeleine, qui reste
aujourd'hui encore, son fleuron industriel avec plusieurs millions d'unités
sortant chaque jour des lignes automatisées de l'usine de Contres. Viennent s’y
ajouter une gamme importante d'autres gâteaux moelleux (quatre-quarts,
brownies...).
Témoignage d’un ancien de chez Morina :
Yves Louet, né en 1947 a travaillé de longues années dans l’entreprise et l’a vu évoluer. Ses frères et son épouse ont également travaillé dans l’entreprise. Il entre à l’âge de 18 ans dans le petit atelier-laboratoire, dans une maison sur la place à Contres En 1965 donc, ils sont 5 personnes : Son frère, Michel Louet, sa sœur, Jacqueline Louet, Monsieur Perrin, Monsieur Poteron et bien sûr lui-même Yves Louet. En outre travaillent bien évidemment Jean-Claude Morina, et son beau-frère Jean-Claude Michau. Je le cite : « Mr Morina a ״acheté״ une recette de cake et une machine à cakes. Il a installé un four Gouet, four à chaînes. Il fait les gâteaux sur commande, beaucoup de cakes, des génoises sèches et des madeleines… Tout est fait à la main. Mr Morina travaillait énormément, il faisait la pâtisserie et les livraisons à bord de son combi-Volkswagen. Il dormait peu. Ses premiers gros clients dont je me souviens, furent, au Mans, les ״Comptoirs Modernes״ (actuel Carrefour). » Yves Louet quitte l’entreprise quelques temps pour devenir chauffeur, ce qui le conduit à venir régulièrement chez Morina où son épouse travaille depuis 1971 (« le soir elle était entièrement blanche, recouverte de lécithine car elle huilait les moules. Elle reste une dizaine d’années avant de travailler chez Daucy »). Et tout naturellement il revient en 1973 pour travailler comme chauffeur livreur et responsable de l’entrepôt. A ce moment l’entreprise compte une vingtaine de personnes. Pendant de nombreuses années (plusieurs dizaines de salariés) date de rachat de la pâtisserie industrielle par Mr Gervoson, il fera des millions de km de la Belgique à Marseille en passant par le grand Est et l’Allemagne… Tandis que Jean-Claude Morina fait des kms pour démarcher et prospecter. Pour terminer je cite encore Yves Louet : « Mr Morina a travaillé dur-dur. Il pouvait tenir n’importe quel poste dans l’entreprise »
Bel
Hommage !
Propos
recueillis par FC
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